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Voici ce qu’il faut retenir du sixième rapport annuel de l’Eglise catholique en Belgique

Pour la sixième année, l’Eglise belge communique son rapport annuel, sorte de « bulletin de santé ». Les chiffres confirment le déclin du modèle traditionnel. Pour autant, le nombre de personnes attachées au catholicisme demeure important. Même si tout le monde n’est pas d’accord avec le fonctionnement de l’institution ecclésiale…

Le rapport annuel paru ce 15 novembre 2023 présente une Eglise largement engagée au service de la société

Comme chaque année, l’Eglise se met donc au rapport. Une démarche de transparence qu’il convient de saluer. Car communiquer largement revient aussi à s’exposer. L’Eglise le fait sans aucunement masquer ses zones d’ombre. Signe des temps: c’est par le chapitre relatif aux abus sexuels que s’ouvre le document. Mgr Luc Terlinden, qui signe la préface, se fait d’ailleurs très clair à ce sujet: « La seule bonne réponse est: tolérance zéro. Et, poursuivre sans relâche la voie de la reconnaissance et de la réparation, comme nous l’avons fait depuis la commission parlementaire de 2010. Seule la vérité libère. »

Le rapport annuel présente aussi une Eglise largement engagée au service de la société. Douze pages sont notamment consacrées aux nombreuses initiatives prises par des catholiques pour soutenir les réfugiés ukrainiens ou envoyer du matériel dans les zones en guerre. Le rapport contient également une série de chiffres. Utile: car si l’on ne peut déduire l’engagement des catholiques à des données quantitatives, on ne peut se passer d’elles pour comprendre les temps que nous vivons. Ils nous permettent notamment de dégager trois grands enseignements.

1. D’après ce rapport annuel, l’Eglise rebondit après la parenthèse Covid

Pour la majorité des observateurs, les chiffres du rapport annuel sont attendus avec grande impatience. Cette année, ils l’étaient même tout particulièrement. En effet, si 2020 avait été l’année de tous les confinements, 2021 était encore marquée par l’imposition de larges restrictions dans les paroisses. 2022 allait-elle coïncider avec un léger rebond? Eh bien, oui! Ainsi, entre 2021 et 2022, le nombre de baptêmes a augmenté de 17% tandis que la participation à la messe de Noël a crû de 18%. Le nombre de mariages a, lui, explosé: + 72% d’une année à l’autre! Seules les premières communions et les confirmations sont en légère baisse.

Attention: l’effet rebond ne devrait pas durer. La forte augmentation du nombre de mariages, en particulier, est liée au report décidé par de nombreux couples. En 2023, un retour à la normale est attendu.

2. Il y a (au moins) deux cercles de catholiques

Une observation sur deux ans est utile. Prendre davantage de hauteur l’est tout autant. L’on peut ainsi comparer les chiffres de 2022 avec ceux de 2017, première année à avoir été analysée. Et pour le coup, on a un peu le tournis. En six ans, l’Eglise a perdu 915 prêtres diocésains. Et, en 2022, la messe dominicale ordinaire a attiré 113.000 personnes de moins qu’en 2017!

Pour autant, le nombre de personnes qui se disent catholiques demeure relativement stable. De même, ils sont nombreux à prendre encore le temps de se rendre en pèlerinage dans un lieu marial, de faire une retraite dans un centre spirituel, ou de demander des funérailles à l’Eglise. « Il y a comme deux cercles », analyse Catherine Chevalier, théologienne à l’UCLouvain, qui a participé à l’élaboration du rapport. « Un cercle rapproché, qui est plus fragile, et un cercle large qui demeure bien présent et qui montre que la question spirituelle demeure importante pour nos contemporains. En même temps, le décalage entre ces deux groupes pose une question majeure: comme gérer l’annonce de l’Evangile face à une telle diversité? »
Parmi d’autres questions se pose celle de l’avenir des paroisses. Est-ce dans ces lieux qu’il faut encore prioritairement nommer les prêtres et assistants pastoraux? « Personnellement, j’aimerais que l’Eglise soit plus présente dans les écoles ou les mouvements de jeunesse, par exemple« , répond Catherine Chevalier.

3. Le fonctionnement de l’Eglise institutionnelle est appelé à changer

En six ans, le nombre de catholiques se rendant à la messe dominicale a fortement diminué. Le nombre de paroisses a aussi diminué, mais dans une mesure moindre. « Attention: les chiffres sont difficiles à interpréter », précise Catherine Chevalier. « De nombreuses paroisses se sont regroupées au sein d’unités pastorales sans que ces paroisses disparaissent pour autant. » Il est cependant manifeste qu’il faut s’attendre à une accélération des désacralisations d’églises dans les années à venir.
Mais c’est de manière plus fondamentale encore que le Rapport annuel vient mettre en évidence les questionnements qui se posent autour du fonctionnement de l’Eglise institutionnelle. De larges échos sont ainsi donnés à la synthèse nationale du processus synodal. Et aux critiques qu’il a pu mettre en évidence. « Un sentiment d’injustice est souligné concernant la place des femmes dans l’Eglise », lit-on ainsi dans le rapport. « Les jeunes souhaitent que l’Eglise soit de son temps. » Ou encore: « La crédibilité de l’Eglise en tant qu’organisation est interrogée: elle est perçue comme démodée, rigide et étrangère au monde. »
Relevons qu’il est peu habituel, pour une organisation, de donner une si large part à celles et ceux qui… critiquent son mode de fonctionnement! « La question s’est posée entre nous, mais on a voulu être fidèle au rapport synodal et je crois qu’on peut en être fier », explique Catherine Chevalier. « L’Eglise est dans un vrai questionnement sur sa façon de fonctionner. Le grand défi qui se présente à nous consiste à réfléchir à ces questions ensemble. » 

Vincent DELCORPS

Vous pouvez télécharger l’ensemble des rapports annuels sur la page:
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